Saison Prague - Episode 14 : Le BREXIT vu d'Écosse

Le BREXIT vu d'Écosse

Par Augustin de Crécy
Depuis le référendum qui a eu lieu le 23 juin 2016, le Royaume-Uni traverse un difficile processus de sortie de l’Union européenne. Si le BREXIT inonde déjà nos médias francophones, vous ne pouvez qu’imaginer ce qu’il en est outre-manche. Retournements de situation et votes décisifs toutes les semaines, la vie politique britannique est noyée dans un Brexit dont le scenario ferait pâlir de jalousie les rédacteurs des scripts de House of Cards.

Face aux échecs du ‘deal’ de Theresa May au Parlement, le sentiment des britanniques est que le jeu politique prend le pas sur les intérêts du pays.


Une inquiétude que je ressens particulièrement au contact des nombreux étudiants internationaux, notamment européens, qui vivent, étudient et travaillent sur le territoire britannique. L’hypothèse d’un no deal est évidemment la plus inquiétante puisqu’ils n’auront aucune garantie quant à leur avenir au Royaume-Uni.


Même en cas de départ plus ordonné, la machine administrative britannique aura, c’est à craindre, bien du mal à faire face aux demandes de 3,6 millions de citoyens européens résidant aujourd’hui au Royaume-Uni.

Au cours d’un événement organisé au Consulat de France, j’ai eu la chance de rencontrer Monsieur Emmanuel Cocher, Consul général de France à Édimbourg. Avec lui, j’ai organisé une réception à sa résidence officielle, pour les étudiants internationaux de ma résidence universitaire, afin de discuter de nos problématiques face au Brexit et à ses enjeux.

Nos discussions ont notamment mis en avant le rôle que pouvaient jouer les implantations diplomatiques et consulaires des différents pays de l’UE pour soutenir leurs nationaux dans leurs démarches.


Au cœur de la situation délicate du Royaume-Uni, l’Écosse est particulièrement ébranlée. En effet, la population écossaise, comme celle d’Irlande du Nord, était en 2016 majoritairement opposée au Brexit. C’est alors la force démographique de l’Angleterre qui traîne l’Écosse hors de l’Union Européenne, ce qui ne manque pas de faire réagir les mouvements indépendantistes, déjà très puissants.



Ce sentiment de contrainte est très répandu aujourd’hui en Écosse, et pas seulement parmi les indépendantistes convaincus. De nombreux étudiants avec lesquels j’ai eu l’opportunité de discuter ont été très marqués par le référendum pour l’indépendance de l’ Écosse tenu en 2014 qui avait vu le ‘NON’ l’emporter avec 55,3 % des suffrages. Lors de cette période d’intense auto-examen pour le peuple écossais, la question de l’Europe était déjà au cœur des débats. Sortir du Royaume-Uni, c’était sortir de l’Union Européenne. Or, le processus d’entrée (article 49 du Traité sur l’Union européenne) peut être difficile, long, coûteux et source d’incertitudes pour l’avenir du pays.

Se voir alors arracher à l’UE par l’Angleterre deux ans plus tard est difficile à vivre pour le peuple écossais et la question d’un second référendum se pose très sérieusement.
De plus, le gouvernement écossais est parfaitement écarté des négociations avec l’Union européenne et ses recommandations en faveur d’un ‘Soft Brexit’ sont ignorées.

On comprend alors que ces fiers écossais s’offusquent, d’autant plus que leurs relations avec l’Europe, et notamment la France, sont beaucoup plus profondes que ne le sont celles de l’Angleterre. On dit que le bleu du drapeau écossais fut établi en l’honneur de la Vieille Alliance – « La plus vieille alliance du monde » selon les mots du Général de Gaulle – qui unissait la France et l’ Écosse contre les perfides Anglois.


J’ai la chance de vivre ces temps troublés en compagnie des principaux intéressés. Leurs espoirs, leurs agacements, leurs résignations, leurs excuses parfois, sont empreintes de la touche d’humour britannique que j’ai appris à aimer. A l’heure où j’écris, impossible de savoir ce qu’il adviendra de l’ Écosse, du Royaume-Uni, ou de l’Union européenne. Quoi qu’il advienne, je le célébrerai au fond d’un pub vieillot en compagnie de deux écossais, un anglais, deux allemands, deux espagnols et un hongrois, parce que c’est aussi ça l’Europe.



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