Saison Berlin - Épisode 9 : L’impeachment : une stratégie vouée à l’échec ?
L’impeachment : une stratégie vouée à l’échec ?
Par Juliette Perrotin (étudiante en 4ème année à la Grande École du droit).
Article du 13 janvier 2020.
Quelles sont les dernières actualités relatives à l’impeachment ?
Le 18 décembre dernier, le Président Donald Trump entra dans l’histoire américaine, en tant que troisième président à être mis en accusation par la chambre des représentants. A l’issue d’un débat acrimonieux entre les deux camps aux vues irréconciliables, la chambre basse, dominée par les démocrates, vota en faveur de deux articles de mise en accusation de l’actuel président des États-Unis.
Le premier accuse Donald Trump d’abus de pouvoir pour avoir fait pression sur le Président ukrainien Volodymyr Zelensky lors d’un appel le 25 juillet 2019, en menaçant de suspendre une aide militaire de quelque 400 millions de dollars destinés à l’Ukraine, afin que le pouvoir ukrainien annonce une enquête sur le rival bien placé pour l’affronter lors de la présidentielle américaine, Joe Biden. Le second article accuse le président d’entrave à la bonne marché du congrès en raison de son refus de participer à l'enquête en destitution le visant.
Quelles sont les prochaines étapes de la procédure d’impeachment ?
En dépit de ce vote de mise en accusation, le président est légitimement autorisé à rester en position, dans la mesure où la Constitution des États-Unis prévoit qu’il appartient au Sénat, actuellement dominé par les Républicains, de déterminer, si les faits reprochés, sont suffisamment graves pour destituer le président. En d’autres termes, la décision prise par la chambre des représentants ouvre seulement la voix à un procès pénal prenant place devant le Sénat, lequel sera suivi d’un vote portant sur la destitution du Président.
Toutefois, les règles encadrant ce processus sont très légères, puisqu’il est seulement requis, par les textes, un procès, présidé par un juge de la Cour Suprême (John Roberts) et dans lequel - les sénateurs agissent en tant que jurés – et certains représentants agissent en tant que procureurs, appelés « managers ». La Constitution prévoit également qu’à l’issue de ce procès, les sénateurs sont tenus de prendre un vote public, lequel aboutira à la destitution du président uniquement si un vote des deux tiers des sénateurs en faveur de ce procédé est réunit. Il n’existe néanmoins aucune indication relative à la tenue du procès.
Un avenir prédéterminé pour la procédure d’impeachment ?
Jusqu’à présent, le Sénat a toujours acquitté les présidents (Bill Clinton, Andrew Johnson) ce qui suggère que selon toute vraisemblance, cette option est la plus probable. En effet, comme le souligne John Cornyn, représentant du Texas, « il est irréaliste d’attendre que la politique ne soit pas le facteur dominant dans cette affaire » puisque la procédure d’impeachment est par essence un procédé politique bipartisan.
Ainsi, dans un contexte dans lequel le Sénat est dominé par les républicains, il semble inimaginable d’espérer un vote destituant l’actuel président républicain. En effet, les sénateurs républicains n’ont aucun intérêt à voter à l’encontre de leur parti, bien au contraire. Faire face au président pourrait compromettre leur réélection lors des prochaines élections le 20 novembre 2020. Ainsi, nombreux s’interrogent sur l’efficacité et l’utilité d’une procédure, dont l’issue semble déterminée au préalable.
Quelles sont les préoccupations des opposants au Président au regard d’une procédure politique dont le résultat semble inévitable ?
Certains auteurs parlent d’une « standardisation » de la procédure d’impeachment, qui pousse les Démocrates à modifier leurs objectifs. En effet, au regard de la composition du Sénat, la principale préoccupation des Démocrates est désormais d’établir un procès équitable et « juste » devant le Sénat.
Selon l’opposition, « protéger la Constitution », la « démocratie » ou encore « l’Etat de droit » menacés par un président qui se croit » au dessus des lois » comme « un monarque ».
suppose l’admission des témoignages proches de Donald Trump au moment des faits reprochés, comme ce fut le cas lors du procès de Clinton, ainsi que l’admission de nouveaux documents lesquels n’ont pas été livrés à l’enquête de destitution menée à la chambre.
Cela serait un moyen de garantir l’impartialité des sénateurs, puisque ce procédé offre un parfait exemple de coopération bipartisane, permettant de conduire un procès le plus juste et équitable possible. De plus, cela suggère, comme le souligne le sénateur Charles E. Schumer « le cas du président est si faible qu’aucun de ses conseillers ne serait en mesure le défendre sous serrement ». Nous ne disposons d’aucune information relative à l’issue de ces discussions pour l’instant, mais il semble que les règles influenceront fortement la tenue du procès, et le résultat.
Néanmoins, en raison de l’absence de règles relatives à l’admission des témoignages, ce sujet fait l’objet de fortes négociations entre le leader des sénateurs démocrates Chuck Schumer et le leader des sénateurs républicains Mitch McConnell.
Dans ce contexte, il semble que le refus de Nancy Pelosy de porter l’acte d’accusation contre le président américain devant le Sénat, jusqu’à ce que les règles gouvernant la tenue du procès énoncent un cadre « juste » ,soit en réalité un moyen employé pour faire pression sur les sénateurs républicain. En effet, en raison de la suspension du Congrès, ce refus est très certainement motivé par le désir de prolonger les négociations jusqu’au 7 janvier, date à laquelle le Congrès reprendra ses activités.
Affaire à suivre ….
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