Quyana*, (Pierre Delassis, UW Law)
Cet
article est un hommage à la population d’Hooper Bay où j’ai eu
la chance de me rendre une semaine entière pour aider à
l'établissement de déclarations d’impôts. Ce fut une expérience
humaine très forte de se rendre ce village Yupik. Je vais donc vous
présenter succinctement dans cet article la culture Yupik.
Les
Yupik appartiennent à cette grande famille de peuplades que l’on
retrouve en Sibérie orientale (à savoir la rive russe faisant face
à l’Alaska), l’Alaska, le Canada et le Groenland. Les Esquimaux
sont également connus sous le nom d’Inuits. Je me suis laissé
entendre dire que le terme Esquimaux ne désigne désormais que les peuplades
sibériennes et d’Alaska. Esquimaux voudrait dire peuple mangeur de
viande cru. Ils sembleraient que les peuplades canadiennes et
groenlandaises n’ont pas apprécié cette appellation et souhaitent
se faire appeler Inuits. Mais en fin de compte il s’agit de
peuplades très similaires.
Maintenant
en Alaska, on trouve principalement des Yupiks et des Aléoutes. Pour
ma part je ne parlerai dans ce post que des premiers.
Yupik
signifie Homme Vrai ou Réel. Ce sont majoritairement des chasseurs
de baleine, de phoque ou de tout autre animal que l’on croise dans
la toundra gelée ou près des côtes d’Alaska. Une ancienne du village d’Hopper Bay
me raconta l’une des légendes fondatrices de son peuple alors que
je faisais sa déclaration d’impôts. En résumé, lorsque l’homme
est apparu sur la surface de la terre, il était nu et faible. Alors
les animaux décidèrent de sacrifier une partie des leurs afin de
permettra à l’homme de se nourrir et de se vêtir. Ils passèrent
un accord avec l’Homme pour que celui-ci puissent chasser les
animaux d’Alaska. Ainsi est nait la nation Yupik. Je lui demandais
si cette légende avait une quelconque incidence aujourd’hui. Elle
m’expliqua alors que les Yupik et en particulier ceux de Hooper Bay
restent des chasseurs-pêcheurs. Et que tout animal chassé devait
servir à la subsistance de la tribu uniquement et non à une activité
commerciale. Ainsi les Yupik se montrent très astucieux pour
utiliser tous les parties du corps de leur proies. Ainsi les globes
oculaires et les écailles des poissons servent par exemple à
faire des boucles d’oreilles. La réutilisation de toutes les
parties des corps des animaux ne relèvent pas uniquement d’une
nécessité de survie mais tient également de la tradition.
Le
village de Hooper Bay est l’un des plus gros villages de la région du sud ouest de l'Alaska.
La population y est d’approximativement 1200 habitants. Cependant
après plus d’une centaine de déclarations d'impôts, je peux affirmer que le village est en réalité composé uniquement d’un nombre restreint de familles. Il doit y avoir tout au plus 10
à 15 familles. Comme vous pouvez vous en doutez, les familles sont
donc très important en terme de membres. La structure familiale est
ici très hiérarchisée. Les anciens dirigent la communauté et
siègent dans le conseil tribal. Les familles sont composées des
grands-parents, parents et enfants qui parfois habitent tous dans la même
maison. Les grands parents élèvent leurs petits-enfants. Il est
déroutant de remarquer qu’au sein d’une même fratrie on
retrouve pour chaque enfant les différentes noms des différentes
familles du village. Il semblerait que le modèle familial
occidental basé sur une stabilité de la cellule nucléaire famille
(parent + enfant) n’a pas cours-ici. Le mariage civil est quant à
lui également peu utilisé. Dans le village, les habitants sont
incités à avoir une très nombreuse progéniture afin de permettre la
subsistance de la tribu. Cela peut paraître irréel vu de notre perspectives. Mais quand on sait que l’espérance de vie est plus
faible ici qu’ailleurs aux USA et afin de pallier le départ d’une
partie des jeunes vers les grandes villes d’Alaska, il parait alors
logique de maintenir un fort taux de natalité. Mais il faut bien reconnaître que cela constitue un véritable cauchemar pour nous qui
établissons les déclarations d‘impôts. En effet avec une moyenne
de 5 enfants pour chaque déclaration d’impôt, cela complexifie
l’attribution de crédit d’impôt (l’équivalent du quotient
familial français).
Je
pourrais continuer ainsi et remplir un livre entier avec tous ce que
j’ai appris sur ma vie chez les Yupik. Cependant j’espère vous
avoir donné un petit aperçu de cette culture ancestrale encore présente dans la
toundra d’Alaska. Qui sait peut-être ai-je suscité des vocations
pour rejoindre UW LL.M in Tax afin d’aller en Alaska.
*Quyana signifie merci en Yupik.
Pierre Delassis
Taxation
LL.M. candidate, University of Washington School of Law, Seattle
(WA), United States of America
Student
of the Grande Ecole du Droit, Paris-Sud University, Sceaux, France.
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